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La possibilité d’être écouté et considéré

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« Vu du Béarn », la chronique d’Olivier Dartigolles. C’était en mars dernier. À Pau. On n’ose l’imaginer et pourtant. Grâce à l’alerte et à la mobilisation des syndicalistes cheminots, la gare de Pau a pu conserver un guichet ouvert. Sans cela, les usagers n’auraient eu à leur disposition que les bornes SNCF. Quant aux autres gares, je pense notamment à la ligne entre Pau et Bayonne, plus rien ne reste.

Dans son rapport annuel d’activité, la Défenseure des droits pointe à juste raison cette question. Alors que la présence humaine ne cesse d’être rognée dans les services publics, que les bornes automatiques se multiplient, que les serveurs téléphoniques nous rendent fou tant le parcours pour avoir en direct un interlocuteur devient de plus en plus improbable, est-il toujours possible d’être écouté et pris en considération ? Comment assurer l’égalité et la continuité du service public sans des femmes et des hommes pour accueillir et accompagner les usagers ?

À Pau toujours, la Préfecture vient d’ouvrir de nouveaux créneaux horaires pour la prise de rendez-vous en ligne. C’est devenu obligatoire comme préalable aux demandes de renouvellement de titres d’identité, de séjour, pour disposer d’un certificat d’immatriculation ou de permis de conduite. Beaucoup de personnes ne parvenaient plus à obtenir ce rendez-vous.

Ce qui pouvait avoir pour conséquence des situations de précarité et même des ruptures de droits : suspension de prestations sociales, la perte d’un emploi, d’un logement. Et ce n’est pas tout. Comme à chaque fois que l’intérêt général recule, la loi du fric s’est très vite organisée. Des logiques de contournement, avec des prestataires privés rémunérés, ayant le plus souvent l’apparence de sites officiels, fleurissent de partout sur le net, en proposant de vous faciliter les démarches administratives.

C’est pourquoi la Défenseure des droits recommande la mise en place d’alternatives efficientes comme l’accueil physique et téléphonique ou le courrier postal. En France, 17 % de la population connaît une situation « d’illectronisme », un illettrisme numérique. La fracture numérique est aussi territoriale avec l’absence d’une grande politique publique en la matière.

Le doute grandissant sur la possibilité d’être écouté et pris en considération, et même aujourd’hui, pour beaucoup de citoyens, la réalité des expériences quotidiennes montrant qu’il ne faut plus y compter, sont au cœur de la crise démocratique. Voilà l’un des chantiers du changement essentiel pour un autre avenir. La vraie écoute à la place des algorithmes. La vraie considération et non pas un « conseil national de la refondation », un « compromis » pour que rien ne change. Une alternative réelle où personne n’a, à lui seul, le pouvoir de dire « comment et avec qui ».

Pour répondre aux besoins et aux attentes, pour en terminer avec le délitement de notre société, regardez combien la présence humaine pourrait, à elle seule, résoudre bien des difficultés et mettre fin à tant de souffrances. Dans l’éducation et la santé, pour les plus petits et le crépuscule des vies, dans le social et la culture, au plus éloigné d’une vallée pyrénéenne ou en cœur de ville, dans toutes les activités essentielles à notre société, nous avons besoin de femmes et d’hommes formés, correctement rémunérés, et, eux aussi, écoutés et considérés.


Robin Higgins de Pixabay.

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