Il pensait à quoi, hier soir, Kylian Mbappé, après cette finale perdue face à l’Argentine ? Après avoir réussi une dernière action de match, en échappant au marquage lourdingue d’Emmanuel Macron – sur le terrain et dans les vestiaires, certains moments n’appartiennent qu’aux joueurs et au staff et à personne d’autre -, où en était-il, lui, après nous avoir donné, avec ses coéquipiers, tant d’émotions ?
Un tel match de foot, après un si beau parcours pour les Tricolores, dépasse la simple dimension sportive pour basculer dans un ailleurs où se mêlent des sentiments contradictoires. Cela a été particulièrement le cas avec cette coupe du monde au Qatar.
Alors oui, il ne s’agissait nullement d’être « d’une poignée de boudeurs d’hier » qui « se cacheront dans les foules des enthousiastes aujourd’hui » (excellente chronique de Romain Bély dans Sud Ouest Dimanche), mais de ne rien oublier des conditions détestables de l’attribution de ce mondial, des vies humaines sacrifiées pour le grand spectacle, des urgences climatiques ensevelies sous la démesure et l’irresponsabilité. Cimetière pour les plus exploités et désastre écologique, merci à l’Humanité d’avoir, dès le match d’ouverture, donné un nom et un visage à des ouvriers originaires de l’Inde, du Bangladesh, du Népal, du Sri Lanka ou du Pakistan, et dont le cœur s’est arrêté bien avant le premier « tir cadré ». Et n’oublions pas aussi, que pendant cette compétition, les conclusions du sommet sur la biodiversité à Montréal restent très en deçà d’objectifs permettant un véritable « pacte de Paix avec la nature ».
Alors, c’est quoi, maintenant, l’après-Qatar ? Va-t-il être possible, dans le cœur des hommes, à commencer par celui des peuples et des « opinions publiques », de changer radicalement la manière dont se préparent et se tiennent les prochaines grandes compétitions sportives internationales ? Marie-George Buffet, ancienne ministre des Sports (1997-2002), vient de proposer la création d’une agence indépendante d’attribution des compétitions internationales. L’Arabie saoudite va organiser les prochains Jeux asiatiques d’hiver en 2029… et quant au prochain mondial de foot, il y a déjà beaucoup à dire.
Une telle agence, fondée sur des principes intangibles et garantissant une réelle transparence sur les conditions à remplir (financement, construction des infrastructures, coûts humain et environnemental, questions sociales et droits humains), cogérée et cofinancée comme l’Agence mondiale antidopage (AMA) par le mouvement sportif international et les États, serait en mesure de répondre aux grands défis humains et environnementaux.
Hier soir, dans le cœur des hommes – et des femmes ! – qui ont vibré devant cette fantastique remontada des bleus, il y avait de la tristesse mais aussi de beaux moments partagés avec d’autres, familles, amis, voisins. Sans oublier tous ceux, happés par le grand froid, dont la vie n’est que survie, et qui n’avaient ni poste de télé, ni personne avec qui « partager ».
Photo @equipedefrance
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